Direct
WATERMELON MAN
PONCHO SANCHEZ

The Dead Don't Die

Le mardi 14 mai 2019, par Laurent Sapir
Le Festival de Cannes s'est ouvert avec une odyssée de zombies prolos signée Jim Jarmusch. Peut-être pas son film le plus essentiel, mais assurément l'un des plus désopilants.

Les zombies façon Jim Jarmusch ? Des rebelles affamés, foutraques, indécrottables. On aurait presqu'envie de leur offrir un gilet jaune ! Les vampires snobs qui avaient autrefois inspiré au même réalisateur le poussif Only Lovers Left Alive étaient bien plus ennuyeux.

À vrai dire, The Dead Don't Die, dont le titre s'inspire d'une chanson à la "cooltitude" assumée de Sturgill Simpson, a surtout l'avantage de ne jamais se prendre au sérieux malgré son scénario horrifique : réveillés par un dérèglement climatique ayant désaxé la planète jusqu'à rallonger les jours, des morts-vivants déferlent sur une bourgade où seuls paraissent leur faire obstacle deux policiers pourtant bien placides au départ (Bill Murray et Adam Driver), ainsi qu'une inquiétante directrice de funérarium (Tilda Swinton) ressuscitant avec brio tout l'art de la décapitation dont faisait preuve Uma Thurman dans Kill Bill.

Évidemment décalé par rapport à un genre que Jarmusch subvertit à sa manière, le film s'offre de savoureux détours cinéphiliques: outre l'hommage attendu à George Romero, les clins d'œil sont légion, du motel genre Psycho à la tombe où est inscrit le nom de Samuel Fuller. Le réalisateur de Mystery Train va même jusqu'à ouvrir quelques fenêtres d'autodérision. "Ça va mal finir, je l'ai lu dans le script du film...", lâche notamment Adam Driver dont le jeu pince-sans-rire est un régal.

Ces effets de miroir vont de pair avec une trame volontairement élaguée. Jarmusch n'a pas la prétention de réinventer les codes de l'épouvante. Encore une fois -et c'est ce qui fait le prix de ses films les moins intellos- c'est la pâte humaine de ses personnages qui le guide, ainsi que le flux caressant qui les enrobe et que Paterson avait sublimé dans un tout autre style.

Sans parler de leur terreau social, voire politique, comme suggéré plus haut. Et puis ils sont tout de même bien tordants, ces zombies prolos avides de wi-fi et autres biens de consommation qui ne font pas dans la dentelle, surtout quand ils font face à des jeunes "hipsters" un peu méprisants. Ont-ils inspiré à Jim Jarmusch son film le plus accompli ? Sans doute pas, mais dans une veine résolument désopilante, The Dead Don't Die tient largement ses promesses. 

The Dead Don't Die, Jim Jarmusch, ouverture du festival de Cannes, sortie en salle ce mardi.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Partager l'article
Les dernières actus du Jazz blog