Dimanche 19 octobre 2025 par Laurent Sapir

La Petite dernière

Tact et sensibilité, plutôt que tension et provocation. Avec "La Petite dernière", portrait d’une jeune femme musulmane qui découvre son homosexualité, Hafsia Herzi prend joliment le contrepoint d'un certain Abdellatif Kechiche...

 

Son pouvoir d'empathie est indéniable. Révélée par Abdellatif Kechiche dans La Graine et le mulet, Hafsia Herzi connaît depuis peu un vrai renouveau : Borgo, de Stéphane Demoustier (avec, dans la foulée, un nouveau César), Les Gens d'à côté d'André Téchiné, et surtout Le Ravissement d'Iris Kaltenbäck, où elle incarnait une sage-femme s'appropriant le bébé de sa meilleure amie. Un discret passage à la réalisation a mis un peu plus de baume sur ce parcours cohérent. Née dans les quartiers nord de Marseille, Hafsia Herzi cultive une sensibilité et une humilité qui en font aujourd’hui l’un des meilleurs vaccins contre l’entre-soi et la franchouillardise qui menacent le cinéma hexagonal.

Son troisième film derrière la caméra, La Petite dernière, en apporte une confirmation souvent lumineuse. Inspiré du roman éponyme de Fatima Daas, le récit suit une jeune banlieusarde de confession musulmane qui tente de concilier ses désirs lesbiens avec sa sociabilité lycéenne, familiale et spirituelle. La toute jeune Nadia Melliti — prix d’interprétation féminine à Cannes — offre à ce personnage un cocktail détonant d’hardiesse et de pudeur, d’intransigeance et d’indécision. Lors d’un tête-à-tête dans une voiture, facilité par un site de rencontres, elle recueille les conseils d’une femme plus âgée sur l'intimité entre deux amantes. La douceur presque maternelle de cet échange en fait l’une des séquences les plus réussies du film, comme si l’initiation et l’émancipation passaient d’abord par la parole.

Rien à voir, on l'aura compris, avec les alchimies si exacerbées de Kechiche lorsqu'il signait La Vie d'Adèle. Baignant dans les mêmes eaux, le propos d’Hafsia Herzi se love au contraire dans une retenue dont son ancien mentor était peu coutumier. C’est dans cette alternative de la suggestion — bien qu’elle flirte parfois avec une certaine joliesse — que le film trouve son équilibre entre justesse et émotion. Maladresses, clichés et caricatures s’invitent un peu plus, hélas, dès que l’héroïne interagit avec ses camarades de lycée ou de fac. Même déception concernant son environnement familial : les sœurs et la mère de la « petite dernière » auraient mérité un regard moins convenu. La séquence avec l’imam, fidèle à ses dogmes mais attentif aux tourments de son interlocutrice, laisse une bien meilleure impression.

La Petite dernière, Hafsia Herzi (Festival de Cannes 2025, prx d'interprétation pour Nadia Melliti), sortie en salles ce mercredi 22 octobre.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La mise en scène 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Iris Kaltenbäck raconte le geste désespéré d’une jeune femme, interprétée par Hafsia Herzi, qui, s’appropriant le bébé de sa meilleure amie, s’enfonce dans le mensonge.

 

 

 

 reçu 17 ans plus tard 

ar du meilleur espoir féminin pour La Graine et le mulet (2007), H