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NINA SIMONE

Notre terreur

Le vendredi 25 septembre 2009, par Laurent Sapir

L'objet laisse un peu perplexe, au départ. Sur une longue table autour de laquelle les membres du Comité de salut public tiennent séance au milieu des spectateurs, une mini-guillotine paraît quelque peu inactive jusqu'au moment où l'un des personnages balance:  "Passe moi le taille-crayon, Robespierre !"... On est évidemment plié en deux, et en même temps au coeur de ce que Sylvain Creuzevault et son collectif  "D'ores et déjà " ont tenté avec brio dans "Notre terreur ", spectacle inaugural de la saison 2009/2010 au théâtre de la Colline à Paris.

Leur but ? Inscrire au présent les antagonismes la Révolution Française; interroger les mécanismes contemporains de la Terreur en partant justement de la crise de guillotinite aigüe de l'an II, et pour cela, transposer dans un tissu relationnel parfois très drôle et qui parle à tout le monde l'épuisement, les faiblesses, les dérives également, et bien sûr les conflits politiques qui ont précédé la chute de Robespierre.

Les documents d'époque servent de colonne vertébrale à l'affaire, mais c'est surtout une bonne dose d'impro qui transforme le plateau en marmite. On en vient même à la baston "citoyenne", parfois, quand le groupe est au bord de l'explosion. Porté par une mise en scène survoltée, "Notre terreur " bouillonne et parfois brouillonne dans plein de directions différentes, mais ce n'est pas demain la veille qu'on tournera le dos à ce genre de théâtre qui passe allègrement au-dessus du tiédasse.

Et puis ça fait du bien, au bout du compte, de voir comment des jeunes types qui en étaient encore au biberon avant la chute du Mur de Berlin se saisissent de l'enjeu révolutionnaire en allant à la source... On leur a tant seriné, dans les manuels, que ce cher Maximilien avait tellement moins d'allure que Louis XIV ou Napoléon. Sans rien ignorer des errements d'antan, la pièce propose tout de même un regard un peu plus dialectique sur la période, au gré d'une farce fracassante et plutôt bien ajustée ce que l'art scénique peut aujourd'hui porter en termes de modernité théâtrale et de conscience politique.

"Notre terreur", création collective de Sylvain Creuzevault... C'est au théâtre de la Colline (Paris 20ème), dans le cadre du festival d'Automne, jusqu'au 9 octobre.

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