Maria

Comme La Callas en fin de parcours dans le nouveau film de Pablo Larrain, on reste sans voix face au manque d'inspiration d'un cinéaste autrefois si brillant dans ses récits biogaphiques au féminin pluriel...
Sa voix a faibli, son corps n'en parlons pas. Cloîtrée dans un vaste appartement parisien d'où elle ne sort que pour déambuler parmi ses fantômes, la reine -ou plutôt l'ex-reine- se meurt. Elle refuse désormais la moindre interview, sauf à un beau jeune homme un peu inquiétant qui semble être une sorte de double médicamenteux tout droit sorti de ses délires. D'ailleurs, il s'appelle Mandrax, comme le comprimé préféré de la célèbre cantatrice. Ainsi Maria Callas s'éloigne-t-elle du monde des vivants.
Le style de Pablo Larrain se ressent-il d'un narratif aussi spectral ? Ses fameuses brisures anti-biopic lorsqu'il filmait à vif les tourments de Jackie Kennedy et Lady Di paraissent désormais brasser de l'air. Le réalisateur chilien se contente ici d'embaumer sa diva sous psychotropes incarnée par Angelina Jolie dans un Paris-musée sur papier glacé.
Des flash-back en noir et blanc rappellent sa splendeur d'antan -La Scala à Milan, La Fenice à Venise, Aristote Onassis sur son yacht - mais c'est un peu morne plaine, jusqu'à cette séquence plus reculée dans le temps où le réalisateur chilien suggère que La Callas et sa sœur se prostituaient à la demande de leur mère en Grèce sous occupation nazie. L'épisode, ceci étant, n'est pas vraiment creusé. On voit bien en vérité là où le bât blesse: dans ses films biographiques passés, le propos de Pablo Larrain fonctionnait d'autant mieux qu'il était adossé à un matériau historique ou politique consistant: la traque des communistes chiliens dans Neruda, l'assassinat de JFK dans Jackie, ou encore le pouvoir aliénant et oppressant des Windsor dans Spencer.
Rien de tel dans Maria. L'esthétique vire du même coup à l'esthétisant et les artifices utilisés sonnent aussi faux que les seconds rôles internationaux -Alba Rohrwacher en cuisinière, Valeria Golino dans le rôle de la sœur, Vincent Macaigne qui joue au docteur (!!)- défilant au gré d'un fastidieux name dropping façon Polanski dans J'Accuse. Une comédienne principale plus inventive dans son jeu aurait peut-être changé la donne.
Maria, Pablo Larrain (sortie en salle ce mercredi 5 février)