Direct
YOU DON'T KNOW WHAT LOVE IS
CHARLIE ROUSE

L'Orestie

Le dimanche 25 mai 2008, par Laurent Sapir

Il se passe toujours quelque chose de plus grand que le théâtre chez Olivier Py... "L' Orestie" en apporte une édifiante démonstration lorsqu' après une heure de spectacle, Agamemnon déboule dans une DS noire qui fend l'arrière de l'Odéon, laissant voir au spectateur la printanière rue de Vaugirard avec ses passants, ses bus, et tout au fond, le jardin du Luxembourg. Faut-il y voir un mauvais jeu de mots lié au propos de la pièce (DS ou déesse) ? Pour ma part, et au-delà de ce que le gadget scénique a de superflu et d'incongru, j'y vois surtout une volonté d' oxygéner un dispositif théâtral qui confine à l' asphyxie.

On l'a tant aimé, pourtant, notre Olivier Py national, avec son sens de la démesure, ces pièces fleuves, ses scénographies mastodontes et ses visions carnavalesques mixant, dans un cocktail qui n'appartient qu'à lui, le trivial, le baroque et le mystique... Mais face à la trilogie d' Eschyle, c'est malheureusement l'emphase et le boursouflé qui prennent l'avantage, notamment dans la première des trois pièces: l' évocation de la guerre de Troie est interminable, l'idée de faire chanter le choeur en grec ancien surtitré vire au mauvais opéra, l' apparition d' Yphigénie, la fille sacrifiée d'Agamemnon, emmaillotée dans un collant rouge, frise le ridicule. Quant à Clytemnestre, l'épouse maudite qui va vider le sang de son mari dans son bain, elle est plus diabolique que réellement tragique.

Le miracle survient, pourtant, dans la 2ème pièce. Un miracle dont seul un metteur en scène aussi christiannisé que Py est capable. La grâce prend alors les traits d'un jeune comédien fabuleux, Nazim Boudjenah. Il campe un Oreste de chair et de failles qui nous bouleverse lors des retrouvailles avec sa soeur, Electre, devant le cercueil de leur père... Plus de dieux, plus d'oracles... Olivier Py scénographie ici les faiblesses des hommes, dans une dominante noir et blanc, et avec une retenue et un sens de l'émotion admirables. Oreste est prêt, dés lors, à purger son innocence en tuant sa propre mère, qu'il occira en tenue d'Adam, réveillant illico les Erinyes, des divinités persécutrices. Il est hélas, à nouveau question, des dieux entre eux dans le 3ème volet de l'Orestie. On se prend alors à rêver d' un Olivier Py qui redescendrait sur terre.

L'Orestie, d'Olivier Py. Théâtre de l'Odéon, jusqu' au 21 juin.

Partager l'article
Les dernières actus du Jazz blog