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DAVE BRUBECK

Freedom

Le jeudi 15 septembre 2011, par Laurent Sapir

Qu'en reste-t-il, de ce "Freedom", une fois dispersée l'écume médiatique? Pas grand chose de bien nourrissant en vérité. Jonathan Franzen nous a fourgué un roman moyen sur les classes moyennes, 720 pages en mode sitcom avec des personnages parfois touchants mais qui ne s'échappent jamais du statut qui leur est assigné au début du récit.

Dés le départ, on comprend, en fait, que Franzen va nous raconter un couple en crise: lui, brave type exténuant de bonté, démocrate bon teint, amoureux de sa femme et des oiseaux; elle, ancienne championne de basket, incomprise, névrosée, dépressive... Son grand regret, c'est de ne pas avoir fait sa vie avec l'ami de son mari, un musicien de rock qui ressemble à Kadhafi et qui se prend pour Bob Dylan...

Rajoutez au casting un fils ingrat qui provoque son père en épousant la cause du Parti Républicain, ainsi qu'une jeune assistante amoureuse de son patron (ce qui est quand même le comble de l'originalité), et voilà résumé le pitch d'un bouquin aux accents tolstoïens, si l'on en croit ses défenseurs les plus décomplexés... Les lecteurs plus terre-à-terre n'y verront, de leur côté, que coucheries et branchitude avec en toile de fond l'urgence écologique et les désillusions post-11 septembre... Jonathan Franzen enfonce à vrai dire beaucoup de portes ouvertes, notamment lorsqu'il traque la perte des idéaux, les compromis qui deviennent des compromissions ou encore l'individualisme forcené.

Au final, c'est un plat pays dépourvu de tout mystère qui traînasse au gré d'une écriture sans relief (et ce ne sont pas les phrases à rallonge ou alors le tic consistant à mettre des majuscules là où elles n'ont pas lieu d'être qui peuvent faire illusion)... On aime trop l'Amérique, franchement, pour s'enthousiasmer à la lecture de  ce "Freedom" cadenassé à la virgule près. On a trop vibré avec James Ellroy, Don DeLillo, Dennis Lehane ou encore Bret Easton Ellis pour que soit hissée à leur niveau un propos et une prose à ce point dénués de vertiges. On a trop d'estime, enfin, pour l'ancien "Libération" -celui de Jean-Paul Sartre- pour ne pas trouver édifiante la Une que le "Libé" version Nicolas Demorand a récemment consacrée à Jonathan Franzen comme si c'était le nouveau génie de la littérature américaine.

"Freedom", de Jonathan Franzen (Editions de l'Olivier)

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