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Tokyo!

Le samedi 04 octobre 2008, par Laurent Sapir

Michel Gondry a imaginé une jeune femme qui se transforme en chaise pour pouvoir enfin se rendre utile. Leos Carax, lui, est sorti de son long silence de cinéaste maudit avec à ses côtés une créature des égouts baptisée "M. Merde" et qui dynamite tout sur son passage, au propre comme au figuré... Quant au réalisateur sud-coréen Bong-Joon-Ho (il avait déjà signé "The Host "), il s'est entiché d'un hikikomori, autrement dit un monsieur fermé à toute vie sociale et clôitré dans son appart,  jusqu'au jour où il rencontre une livreuse de pizza dont le look mutant le laisse sans voix, surtout lorsqu'elle croit bon de s'évanouir chez lui à la faveur d'un tremblement de terre...

"Tokyo!" avec son joli point d'exclamation comme étendard d'un cinéma nourri de poésie, de fraîcheur et de modernité, rassemble donc ces trois stories dans ce que l'on appelle un peu sottement un "film à sketches", mais qui prend ici la forme d'une rhapsodie tokyoïte de toute beauté dont la cohérence, d'un moyen-métrage à l'autre,  n'est jamais prise en défaut. Car c'est la jungle urbaine, la ville-chantier, la mégapole proliférante qui est le sujet essentiel des trois films: Michel Gondry l'aborde sur le mode fantastique, version Polanski, en racontant la perte d'identité progressive d'une Japonaise à qui son copain reproche son manque d'ambition...

Il y a de quoi finir "chaise", effectivement... Bong Joon-Hoo, lui, décline son Tokyo sur un mode romantique et encore plus surréaliste : son personnage d' hikikomori renaît à Tokyo comme on renaît à l'amour, avec des plans ensoleillés sur une ville qu'il a fallu au préalable vider de ses rues encombrées suite à des séismes à répétition... C'est à un autre type de vertige, enfin, auquel a recours Leos Carax en dégainant toute la panoplie punk à travers son personnage de Mr Hyde underground qui se nourrit de fleurs et de billets de banque... Ce drôle de zigoto, campé par un Denis Lavant encore plus animal qu' à l'accoutumée, va devenir l'homme à abattre...

Là encore, mais cette fois dans un registre qui tient plus de la farce politique, le film oppose la radicalité individuelle et un certain conformisme engloutissant propre à Tokyo, avec tous les clichés que l'on connait sur les Japonais raisonnables, ambitieux et maniaques de l'hygiène... On l'aura compris,    c' est un pur décollage, ce film ! Tokyo n' y est peut-être pas filmée sous son meilleur jour, mais quand une ville inspire à trois metteurs en scène aussi différents entre eux un tel cocktail de fantaisie et de vitalité, on se dit qu'on aurait quand même bien envie de s'y perdre, nous aussi, avec le même bonheur que celui qui nous saisit au générique de fin.

Tokyo! de Michel Gondry, Leos Carax et Bong Joon-Ho (Sortie en salles le 15 octobre)

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