Direct
WHEN WE'RE HUMAN
MICHAEL LEON-WO/TERENCE BLANCHARD

Passion

Le mardi 05 mars 2013, par Laurent Sapir

On le croyait dopé à Hitchcock, il ne jure plus que par George Cukor... Brian de Palma a même confié à la revue "Transfuge" qu'en faisant un remake du dernier film d'Alain Corneau (pas vu, donc pas de comparaison éventuellement désobligeante pour l'homme de "Série Noire"...), il avait d'abord voulu faire un "film de femmes pour les femmes". On est personnellement très heureux de constater que ce qui advient à l'écran ne reflète pas du tout les ambitions initiales du cinéaste.

Un film de femmes pour les femmes, vraiment ? Mais alors pourquoi a-t-il tellement l'air de ricaner dans son coin, ce patron de multinationale en train d'humilier la plus manipulatrice des deux donzelles venues lui soumettre un projet de campagne publicitaire ? Du Cukor, tous ces vertiges grivois et autres voracités saphiques qu'une caméra décidément bien trop lubrique scrute avec une virtuosité suspecte ? Nous, on penserait plutôt à  Billy Wilder et à son génie du vulgaire...

Le paradoxe du film, c'est que le regard libidineux de De Palma n'alourdit en rien la stylisation à laquelle il s'abandonne. Le travelling, chez lui, est d'abord une affaire de vice, et c'est sur un mode résolument délictueux que le spectateur s'abandonne aux mille et un faux semblants d'une trame ponctuée de l'un de ses fameux split-screen dont le réalisateur de "Carrie" a le secret. Le procédé s'en trouve d'ailleurs prodigieusement enrichi avec une partie du plan (le ballet chorégraphique) qui déborde sur l'autre (la scène de meurtre) et vice-versa, comme si le degré de vérité des deux séquences variait en fonction de ce ce que le scénario allait révéler par la suite.

Glaciale et sexy, offerte et vampirisante, Rachel McAdams crève l'écran en business woman aussi maléfique que l'univers ultra-mondialisé qui lui sert de carapace. Noomi Rapace, qui joue sa subordonnée pas si innocente qu'elle en a l'air, lui offre une répartie pareillement astucieuse dans ce thriller glamour et sophistiqué dont l'épilogue semble surfer sur les puissances du rêve et du fantastique. De quoi réveiller le souvenir d'un "Mulholland Drive" riche en spéculations sur les croisements des blondes et des brunes (et ne parlons pas des rousses !) même si leurs attributs respectifs, ici, ne se confondent avec aucune vertu.

"Passion", de Brian De Palma (le film est sorti en salles le 13 février)

Partager l'article
Les dernières actus du Jazz blog