In Waves
Offrant l'océane langueur d'une mélodie à chaque vague, le nouvel album du saxophoniste Samy Thiébault, "In Waves", tient toutes ses promesses, aussi bien aquatiques que musicales. Concert à Meudon ce mercredi.
De jazz et d'eau fraîche, le nouvel album de Samy Thiébault est imbibé d'une "océane langueur", comme le chantait Jacques Brel dans la plus belle de ses chansons, Une Île. Paysages à la fois aquatiques et poétiques avec comme toujours, chez le saxophoniste, une envie de rencontrer des peuples à travers leurs traditions musicales. Les Caraïbes ont trouvé récemment chez Samy Thiébault un conteur de première. In Waves élargit les latitudes: ce sont les "peuples de l'eau" que le saxophoniste célèbre à présent, du côté des Antilles mais aussi là-bas, dans le Pacifique Sud ou aux Fidji.
On n'ose pas écrire que le musicien y est comme un poisson dans l'eau, surtout en des lieux où le dérèglement climatique fait des ravages, mais pour ce natif de Côte d'Ivoire ayant grandi en France au bord de l'Atlantique et de la Méditerranée, il suffit de se laisser porter par la vague, lui qui a réactivé récemment une passion ancienne pour le surf. Le morceau-titre donne le tempo: l'écume en intro, les pêcheurs qui embarquent, le parfum du grand large faisant fi des distances... Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si ce In Waves a été conçu au Maroc avant de prendre sa forme définitive aux Fidji et d'être enregistré à Cayenne avec Fanswa Ladrezeau et l'éminente famile Cippe qui perpétue la tradition des tambours de Guyane.
Les autres "plages" de l'album déclinent avec le même bonheur cette dialectique de l'individuel et du collectif (ou celle de l'étreinte et de la lutte typique des surfeurs les plus accomplis...) avec de la part de Samy Thiébault une ferveur qui le rend paradoxalement plus économe en solos mais pas moins généreux dans sa pratique instrumentale. Sur une première écoute, l'Afrique semble être en pole position dans l'inspiration, comme un hommage au continent-source de toutes les migrations. D'autres morceaux, qui restent encore davantage à l'esprit, partent pourtant ailleurs, à l'instar du magnifique Theuykhong ancré dans la culture du fleuve Mékong avec ses effluves électro et ses bambous magiques.
Une mélodie ensorcelante, La Chanson d'Arnaud, dédiée au batteur Arnaud Dolmen, se glisse également dans l'album, comme une jolie dette au nouveau groupe de Samy Thiébault où figure également le pianiste Leonardo Montana, complice par ailleurs d'Arnaud Dolmen dans un autre album sorti en début d'année. Difficile enfin, dans ce beau travail, de ne pas accorder toute sa place au soleil à la flûtiste, productrice et DJ Marine Thibault. "Sous les tropiques exactement", comme l'écrit joliment David Koperhant dans le livret de l'album, elle apporte à l'orchestre un surplus de rêve et d'entité organique"... Une saveur qui résonne particulièrement dans le mélancolique Dakhla.
In Waves, Samy Thiébault (Gaya Music). En concert ce mercredi 27 novembre au Centre d'art et de culture de Meudon(92), à l'Espace Paul-Eluard de Stains (93) le 13 décembre pour le festival Africolor avec Fanswa Ladrezeau et les frères Cippe, puis au New Morning, à Paris, le 23 janvier prochain.