Deux Sœurs

Avec "Deux Soeurs", le vétéran britannique Mike Lee signe une touchante étude de caractère -et quel caractère !- au sein d'une communauté ouvrière afro-caribéenne.
Doté d'une richesse d'âme et d'une sensibilité socio-politique qui devraient lui éviter, espérons-le, tout procès en "appropriation culturelle", Mike Lee a opté pour un casting presqu'entièrement noir en se portant au chevet de Pansy, une quinquagénaire dépressive qui fait vivre un enfer à sa famille. Son mari ouvrier et son fils obèse encaissent en silence ses sautes d'humeur tandis que sa sœur coiffeuse, de nature plus enjouée, essaie tant bien que mal de la sortir de cette rage pathologique qu'elle semble nourrir envers le monde entier.
Portée par la douceur tranquille d'un quartier ou d'un jardin familial, la caméra du vétéran britannique s'abstient soigneusement de juger son personnage. Pansy est un être impossible, mais il est impossible de la détester. On serait presque de tout cœur avec elle lorsqu'elle balance ses quatre vérités à quiconque tente de l'amadouer avec des sourires de façade, et lorsqu'au fil du récit on comprend à quel point elle n'a pas réussi à faire le deuil de sa mère, l'émotion n'a aucune difficulté à affleurer.
Trente ans après Secrets et mensonges, Marianne Jean-Baptiste retrouve un cinéaste qui sait indiscutablement la mettre en valeur. Le trait, comme cela arrive parfois à Mike Leigh, est un peu appuyé de temps en temps, et on aurait aimé qu'il fasse respirer davantage certains personnages secondaires (les filles de la sœur coiffeuse, par exemple...), mais l'univers du réalisateur de Naked, Another Year et Mr Turner demeure aussi touchant et attachant que la mise en forme qu'il lui offre.
Deux Sœurs, Mike Leigh (Sortie en salles ce mercredi 2 avril)