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KILLING ME SOFTLY WITH HIS SONG
YOUN SUN NAH

Vaudoo

Le mercredi 22 avril 2009, par Laurent Sapir

Il bourlingue, globe-trotte, crapahute... A tant voyager dans sa vie, son coeur et sa musique, Patrick Artero a fini par dissuader toute velléité de le cantonner à un endroit précis sur la planète jazz... Il faut dire que c'est une mappemonde à lui tout seul, Artéro : naissance vietnamienne, transbahutage algérien, bifurcations salsa... On avait réussi il y a quelques années  à le coincer dans le "plat pays" lorsqu'il s'était délicatement tourmenté sur les traces de Jacques Brel à travers un disque sublime, extraordinairement symphonique et au final mal compris.

Le revoilà aujourd'hui plein Sud avec "Vaudoo ", album-événement ! C'est un peu le paradoxe des grands géographes: ils ne détestent pas les terrains familiers. Explorer, c'est déjà "se" reconnaître quelque part. C'est partir de ses propres repères pour les dépasser et donner à voir une nouvelle géographie en terra incognita. C'est ce qu'a fait Patrick Artéro en retrouvant cette Nouvelle-Orléans dont il avait déjà arpenté les grandes artères du temps des "Haricots Rouges ".

Sauf que cette fois-ci, ce n'est plus le "berceau du jazz" qui hypnotise le trompettiste. Ce sont plutôt les drôles de fées au-dessus du berceau:  sorcières vaudou, mulâtresses en transe, fantômes des marais... Elle danse avec les serpents, la Nouvelle-Orléans d'Artéro. Elle batifole avec les alligators. Elle donne matière, surtout, à un album endiablé et nonchalant, dansant et poignant, pimenté et arômatisé, vagabond et authentique.

C'est déjà l'accomplissement rythmique de l'ensemble qui impressionne: accents funky, parfum boogaloo, épices reggae... L'esprit du swing et les rythmes de Congo Square sont également au rendez-vous bien sûr, grâce à un sextet nourri à tous les grands mix qui ont revitalisé la Cité du Croissant. Patrick Artéro a fait appel pour cela à des musiciens louisianais et caribéens comme Don Vappie, le guitariste-banjoïste de Wynton Marsalis, ou encore Arnold Moueza, percussionniste guadeloupéen dopé à tous les rythmes afro-cubains.

Il a surtout trouvé l'audace , Artéro, pour ne pas revisiter des standards essoufflés, préférant "laisser le bon temps rouler " sur des compositions  qui regorgent de climats délicieux. On pense à "Snake Danse " et à ses gimmicks woua-oua, "Bayou St John Reunion " et son refrain entraînant, "Mysterious Marie " pleine de grâce, ou encore "Congo Square Bamboula ", dont l'intro toute en volutes précède un coktail des plus explosifs. Jean-François Bizot, autre fan d'une Nouvelle-Orléans rétive aux sillons trop convenus, aurait très certainement vibré sur ce "Vaudoo " plein d'allant et d'élégante souveraineté.

Vaudoo, de Patrick Artero (Plus Loin/Harmonia Mundi) . Sortie le 23 avril. Rendez vous avec Patrick Artéro le mercredi 29 avril dans le 20h de TSF.

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