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SKATING IN CENTRAL PARK
BARNEY WILEN / ALAIN JEAN MARIE

Valse pour Monica (contre)

Le jeudi 13 mars 2014, par Laurent Sapir

Le jazz vibre, Monica vibrionne. Le jazz est chaud, Monica est fade. Le jazz se fout d'être une musique d'hier ou d'aujourd'hui, Monica, elle, est résolument, tragiquement, définitivement has been. Il faut la laisser valser en rond devant la caméra assommante d'académisme du réalisateur danois Per Fly. Il faut se reporter à la vraie Monica Zetterlund dont ce biopic vraiment peu épique est inspiré pour que la valse swingue en waltz...

C'était au temps où la Suède débarquait à Harlem. Au milieu des années 60, une blonde scandinave rescapée de l'Eurovision les met alors tous par terre (et parfois même dans son lit), les Miles Davis, les Sammy Davis Jr, les Stan Getz... C'est un binoclard, pourtant, qui va réellement la transfigurer, notre Monica. Jusqu'à lui faire enregistrer une version de Waltz for Debby avec des paroles suédoises. Trop fort, ce Bill Evans !

Le reste de la Monica Life est moins glorieux, mais c'est ce qui, visiblement, intéresse le plus Per Fly. L'alcool, la bêtise des hommes, l'impossibilité de concilier une carrière de musicienne avec l'épanouissement d'une mère de famille... Valse pour Monica s'enlise dans ce bourbier avec la subtilité d'un bulldozer malgré la grâce touchante d'Edda Magnason (Coup de projecteur, mais alors seulement sur elle et sur le compositeur de la BO, mercredi prochain sur TsfJazz...) , l'actrice et chanteuse qui joue Monica.

C'est lorsqu'on voit passer Ella Fitzgerald dans ce mauvais téléfilm qu'on comprend ce qui cloche. Quand on aime le jazz, on n'inflige pas ça à Ella. On la fait jouer autrement, et surtout on lui donne d'autres traits que ceux de cette grosse potiche caricaturale censée la représenter dans une fiction. Quand on aime le jazz, on en filme les mystères, les effluves, les élévations, l'insoluble et trépidante modernité. Tant pis si on ne s'appelle pas Cassavettes, Louis Malle ou Clint Eastwood. Seule compte la confiance en cette musique. Ici, hélas, tout est aplati. les années Blue Note virent au bleu poussiéreux, l'épopée monte au grenier, le mythe grouille de mites... Et Monica mériterait de s'appeler Monique.

Valse pour Monica (Sortie en salles le 19 mars), de Per Fly. strong>N.B. Cet avis sur le film n'engage que moi. Valse pour Monica a aussi de talentueux défenseurs à TSFJAZZ, comme en témoigne la plume toujours enchanteresse de Laure Albernhe.

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