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La Ballade de Buster Scruggs

Le samedi 08 décembre 2018, par Laurent Sapir

Leur Far-West regorge de diligences, saloons et autres odyssées pour gibets de potence. C'est léger, fantasque, macabre et loufoque dans le même élan. Bref, c'est le nouveau film des frères Coen, une ballade en six vignettes au royaume d'un genre dont les frangins flingueurs malaxent et pulvérisent les codes à leur guise avec un sens de l'absurde qui s'en donne à cœur joie.

Après une entrée en matière plutôt rigolote et ancrée dans l'esprit cartoons (Tim Blake Nelson en Lucky Luke faussement lunaire et bizarrement accoutré essayant de sauver sa peau dans un univers à la Sergio Leone...), le deuxième sketch met déjà la barre assez haut avec James Franco en mode introverti dans la peau d'un braqueur poursuivi par la poisse. Dialogues tordants, ("Le fumier de la banque ne se bat pas à la loyale, à mon sens"), mise en scène et final au cordeau, dans tous les sens du terme... Un pur régal.

On est un peu plus dubitatif sur le 3eme segment qui voit Liam Neeson promener à travers les villages un homme-tronc déclamant des monologues de théâtre, ne serait-ce que parce qu'on ne sait pas trop, ici, où les frangins veulent nous emmener. Quant à l'épisode Tom Waits en prospecteur acariâtre, il vaut surtout par l'impressionnante palette visuelle à laquelle a recours ce segment avec à la clé un Far West transformé en paysage coloré à la Bambi.

Le meilleur survient avec la séquence la plus développée du film. Elle est centrée sur une Zoe Kazan pas franchement glamour flanquée d'un caniche pour le moins incongru au milieu d'un convoi de pionniers. L'occasion pour Ethan et Joel Coen de renouer avec un certain souffle épique plus proche, en l'occurrence, d'Arthur Penn (le gamin qui marche à reculons...) que de John Ford. L'esprit d'un certain Quentin Tarantino, enfin, irrigue l'ultime vignette où les passagers d'une diligence confrontent leur vision du genre humain avant d'arriver à une destination qui semble correspondre à une sorte d'au-delà. Ambiance aussi gothique qu'anecdotique.

Ensemble inégal, donc, mais qu'on aurait tord de bouder au regard de la variété de pépites et de tonalités qu'il recèle. De fait, ces mini-westerns façon chemins de traverse sont bien plus affriolants que les deux précédentes explorations du même genre qu'avaient été No Country For Old Men et True Grit.

La Ballade de Buster Scruggs, Joel et Ethan Coen (Sur Netflix depuis le 14 novembre)

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