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Contes du hasard et autres fantaisies

Le lundi 04 avril 2022, par Laurent Sapir
Auréolé de son Oscar du meilleur film étranger pour "Drive my car", Ryusuke Hamaguchi confirme sa très belle tenue de route du moment avec trois contes merveilleusement ciselés qui ne le rattachent pas seulement à la tradition rohmérienne.

La douce douleur d'exister continue d'irriguer l'univers de Ryusuke Hamaguchi. Après le si ample Drive my car adoubé par la cinéphilie internationale, ses Contes du Hasard... en donnent assurément une version plus resserrée et moins dramatique (il est aussi de "fantaisies " dans le titre du film) sans pour autant renoncer aux motifs chers à ce désormais immense cinéaste japonais.

Trois contes façon Hamaguchi, donc, comme autant de variations délicates et piquantes, à l'instar du premier récit: alors que sa meilleure amie s'extasie sur sa nouvelle conquête, une jeune femme comprend du même coup avec qui son ex-compagnon entend refaire sa vie. Dans le deuxième conte, une étudiante tente de séduire un écrivain en lui lisant les passages les plus osés de son roman. Le troisième segment du film, enfin, met en scène une jeune femme qui croit reconnaître une ancienne amante en la croisant entre deux escalators.

En deux temps ou plutôt trois mouvements, c'est bien l'esprit d'Eric Rohmer que le réalisateur japonais convoque de manière facétieuse ou aigre-douce... Rohmer ou alors son pendant asiatique le plus connu, le Sud-Coréen Hong Sang-soo avec lequel le réalisateur japonais partage la finesse du trait et l'état de grâce dans l'art des portraits féminins. De quoi enrober avec bonheur des désirs incertains d'eux-mêmes, des paroles qui font paravent et des interactions qui ne produisent pas forcément le résultat escompté.

L'émotion ne prend pas ses grands airs au gré de ces trois récits. Elle se contente de cheminer à l'intérieur d'une poétique de la rencontre où la tension sexuelle est également partie prenante. C'est peut-être là, lorsque la déstabilisation érotique donne parfois lieu à un zoom tremblant mais définitif, qu'Hamaguchi tire une singularité qui le rattache autant à Cassavetes qu'à Rohmer. Il se révèle alors bien moins impassible que ne le suggèrent ses plans-séquences ciselés et épurés.

Contes du hasard et autres fantaisies, Ryusuke Hamaguchi, Lion d'argent à la Berlinale (Sortie en salles ce 6 avril)

 

 

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