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The Artist

Le mardi 11 octobre 2011, par Laurent Sapir

Je l'avoue piteusement: le cinéma muet, ça me gonfle... A part Charlie Chaplin et "Le Cuirassé Potemkine", je trouve insupportable ces mimiques d'un autre âge, ces cartons à l'écran où s'inscrivent des dialogues niveau maternelle,  et surtout ces musiques d'accompagnement qui assourdissent le coeur en prétendant dicter nos sentiments. Finalement, c'est très bruyant, le cinéma muet...  Autant dire que je ne suis pas le client rêvé pour "The Artist".

Certes, l'artillerie lourde dont le trio Michel Hazanavicius-Jean Dujardin-Bérénice Bejo est coutumier ( je l'avoue tout aussi piteusement: les aventures de l'agent OSS 117 m'ont toujours laissé de marbre...) prend ici ses habits de soirée. Il s'agit, excusez du peu, de rendre un hommage appuyé au bon vieux cinéma d'autrefois à destination de toutes ces générations d'ignares qui seraient passées à côté de "Sunset Boulevard" et "Chantons sous la pluie". L'équipe de "The Artist" a convoqué pour cela toutes les prouesses technologiques dont elle est capable.

Reste à savoir si on peut aimer un film uniquement pour ses prouesses technologiques... Reste à savoir, également, si on peut se satisfaire d'un Jean Dujardin marketé jusqu'à plus soif avec son profil à la Errol Flynn lorgnant vers Douglas Fairbanks, tandis que Bérénice Bejo se la joue fantasme vintage sans la moindre faute de raccord... Et après ? Comment trouver un semblant d'intérêt à cette romance pleurnicharde et infantile autour des malheurs d'un bellâtre star du muet flanqué d'un chien aussi cabot que son maître? Où est la poésie ? De quelle profondeur, si ce n'est celle de l'ennui, se nourrit cette intrigue à vignettes dont le seul mouvement consiste à sautiller de références cinéphiles en pastiches divers et variés? Même la B.O. ne fait pas illusion, d'autant plus qu'on nous l'avait vendue jazzy à souhait alors qu'à deux ou trois exceptions près on est plongé dans la gluance philharmonique la plus indigeste...

Une seule séquence secoue réellement nos paupières: Jean Dujardin incapable d'émettre le moindre son alors qu'autour de lui, dans un noir et blanc soudainement bergmanien, des bruitages amplifiés suggèrent le nouveau monde du parlant auquel il ne parvient pas à s'adapter. Moment magnifique, angoissant, comme si le scénario prenait une direction inattendue...  Il ne s'agit, hélas, que d'un rêve. Ensuite, on retombe dans le cauchemar.

"The Artist", de Michel Hazanavicius (Sortie en salles ce 12 octobre)

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