Direct
MI NEGRA AVE MARIA
ROBERTO FONSECA

Everything Everywhere All at Once

Le dimanche 04 septembre 2022, par Laurent Sapir
Quand une laverie automatique se transforme en monde virtuel où tout est permis... Film-phénomène outre-Atlantique, "Eveything Everywhere All at Once" voit surtout le grotesque et le n'importe quoi se livrer à une concurrence acharnée.

Encensé par certains comme le film le plus dingue de l'année, Everything Everywhere All At Once apparaît surtout comme l'avatar particulièrement pénible d'une entreprise cousue de fil blanc: le blockbuster à façade intimiste, avec en bonus une rimbambelle de clins d'œil cinéphiliques et la dose de politiquement correct qu'il convient. Derrière la caméra, deux loustics, Daniel Scheinert et Daniel Kwan -on les surnomme les Daniels. Labellisée par un studio indépendant, A24, leur recette a au moins le mérite de la simplicité : prenez une femme pas trop jeune, une valeureuse immigrée chinoise réfugiée aux États-Unis, par exemple, et faites-en un super-héros capable de résoudre les galères qui lui tombent dessus.

C'est lors d'un rendez-vous avec une inspectrice des impôts (Jamie Lee Curtis) qui menace de liquider sa laverie automatique que notre quinqua à la mine bien fatiguée bascule dans un autre monde. Voilà que son mari timoré prêt à divorcer se transforme en commandant couillu et l'embarque dans un monde parallèle -le fameux multivers-où l'on peut fréquenter plusieurs dimensions de soi-même, notamment au regard de ce qu'on aurait voulu devenir. S'ensuit un tourbillon où un seul personnage devient tour à tour star de cinéma, cheffe cuisinière ou championne de kung-fu.

Il y a évidemment un méchant dans cette pataugeoire hightech à laquelle, comme dans un film de Christopher Nolan,  on finit par ne plus rien comprendre. Ou plutôt une méchante qui prend étrangement les traits de la propre fille de l'héroïne, une demoiselle mal dans sa peau en couple avec une autre femme. Après bien des rebondissements où le grotesque et le n'importe quoi se livrent une concurrence acharnée, toute la famille parviendra à se réconcilier dans un épilogue pour le moins sirupeux.

Quelle purge ! Les codes qui permettraient d'en décrypter l'éventuel intérêt ne sont-ils accessibles qu'aux 15-20 ans ? De Ratatouille à 2001, Odyssée de l'espace en passant par In The Mood For Love, les références auxquelles ont recours les Daniels laissent pourtant entrevoir leur volonté de s'adresser à des publics différents. Pour ce qui nous concerne, ce cinéma tape-à-l'œil et assourdissant, tellement révélateur qui plus est de la crise du récit qui traverse désormais une partie de l'industrie cinématographique américaine post-COVID, n'est définitivement pas notre came. 

Everything Everywhere All At Once, Daniel Scheinert et Daniel Kwan (le film est en salles depuis le 31 août)

 

 
Partager l'article
Les dernières actus du Jazz blog