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CHRIS MINH DOKY

Chronique du règne de Nicolas 1er

Le dimanche 27 janvier 2008, par Laurent Sapir

Patrick Rambaud se soigne en se faisant plaisir, ce qui n'est pas donné à tout le monde. Grièvement blessé, semble-t-il, par la victoire de Sarkozy au printemps 2007, il a cicatrisé l'affaire sous la forme d'un pamphlet "Chronique du règne de Nicolas 1er", dont l'usage se veut en premier lieu thérapeutique après la grande dépression qui a terrassé "l' équipe 47 %" le 6 mai de l'année dernière.

Pour ce faire, Rambaud a opté à la manière d'un presque homonyme, André Rimbaud, qui dans les colonnes du Canard Enchaîné s'amusait à dépeindre les régimes de De Gaulle et Giscard sous les traits d'une monarchie, avec tout leur lot de féodaux et de courtisans dont le ridicule n'avait rien à envier au prince qu'ils servaient. Patrick Rambaud a repris ce procédé en convoquant autour de notre nouveau souverain Nicolas 1er, l'impératrice Cécilia, la baronne d'Ati, le cardinal de Guéant et autres chevaliers de Guaino... N

Ne manque à l'appel que la comtesse Bruni, mais l'auteur a très vite pallié ce manque en ajoutant un ultime chapitre dans les colonnes du Nouvel Obs. Disons-le franchement: le propos ne fait pas toujours mouche. Etait-il vraiment nécessaire de brocarder Sarkozy en se moquant de sa petite taille ? Fallait-il aller jusqu'à écrire, pour preuve de l' inculture supposée de Nicolas 1er, que Lafayette n'évoquait pour lui que les célèbres magasins parisiens et non pas le célèbre général américanophile ( Ne serait-ce pas contradictoire justement avec le caractère atlantiste du personnage ) ? Le passage sur Sarkozy rendant visite à des malades d'Alzheimer qui oublient aussitôt son identité relève t-il vraiment du bon goût ? N'y a t-il pas un peu "tirage sur l'ambulance", enfin, à affubler ce pauvre Eric Besson de l'étiquette " batracien rutilant ", quand la plume prend curieusement des accents moins féroces pour un autre transfuge beaucoup plus illustre, le comte d'Orsay en l'occurrence ( Kouchner ) ?

Trop appuyée, la prose loupe le coche. Jean-François Kahn s'était pareillement cassé les dents, entre deux tours d'élections, lorsque sa tirade-marathon sur " Sarkozy est un fou " n'avait eu comme résultat que de servir sur un plateau la diabolisation dont rêvait son adversaire proclamé. En fin de compte, décrire le Sarkoland sous le mode de la Monarchie ne fait pas avancer le Schimblick. Les prédécesseurs de Nicolas 1er offraient le même angle d'attaque. Quelqu'un comme Alain Badiou, avec son petit bouquin "De quoi Sarkozy est-il le nom?" s' est essayé justement à autre chose, avec au final des vraies pépites de lucidité entre deux effluves gauchistes. C'est beaucoup moins (auto) gargarisant que le bouquin de Rambaud, mais autrement plus stimulant.

"Chronique de Nicolas 1er ", de Patrick Rambaud (Editions Grasset)

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