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Vice

Le samedi 09 février 2019, par Laurent Sapir
Les turpitudes de Dick Cheney sur grand écran... La charge est féroce, mais pourquoi tant de maniérisme dans la mise en scène ?

Ces films qui jouent à être plus malins que leurs spectateurs... Dans le genre, Vice fait très fort, car pour évoquer le destin de Dick Cheney, mentor des néo-conservateurs américains, le réalisateur de The Big Short, Adam McKay, a recours à des artifices de mise en scène qui servent surtout de paravents à un regard politiquement indigent.

Musique soudainement pompeuse, faux générique de fin, regards caméra, reprise incongrue d'un texte de Shakespeare lors d'une conversation banale... Rarement, sous couvert d'ironie pseudo-mordante dans la pataugeoire du politiquement correct, une narration ne s'est montrée aussi peu confiante en elle-même. Jusqu'à d'ailleurs confier les clés de cette narration à un personnage ultra-secondaire, mi-candide, mi-coryphée, et dont la seule raison d'être tient à sa toute dernière scène.

Pour le reste, le vitriol espéré tourne au vinaigre. Comment devient-on Dick Cheney, ce "redneck" du Wyoming ayant fait ses classes chez Nixon avant de devenir le vice-président de George W. Bush ? Pas de réponse, ou alors on en revient au fameux "cherchez la femme". "Sois un homme, mon Dick", lui assène sa sous-Lady Macbeth d'épouse (Amy Adams), peu désireuse de faire sa vie avec un buveur pareil. Cela suffit, paraît-il, pour devenir un monstre de cynisme rompu à toutes les filouteries de l'époque, jusqu'aux mystifiantes "armes de destruction massives" attribuées à Saddam Hussein.

On aurait bien aimé, en ce qui concerne justement ces années-là, qu'Adam McKay soit un peu plus prolixe sur les liens entre Cheney et Halliburton, cette société pétrolière dont il a renfloué les caisses à la faveur de la 2ème guerre d'Irak après en avoir été le PDG, mais ce volet "Monde Diplomatique" du récit était sans doute trop barbant aux yeux du metteur en scène. On aurait aussi apprécié que des profils majeurs de cette période comme Colin Powell et surtout Condoleeza Rice (trop noirs de peau pour le "camarade" McKay ?) soient traités avec moins de mépris. 

Coup de chapeau, en revanche, à la maquilleuse de Christian Bale qui l'a mis en pole position pour l'Oscar du meilleur acteur puisque ce genre de critère semble de nos jours si décisif pour décrocher cette récompense. C'est bien là, en tout cas, le trait le plus spectaculaire d'un biopic qui tente bêtement, par ailleurs, de forcer le trait d'union avec l'Amérique de Trump alors que l'actuel patron de la Maison-Blanche, si controversé soit-il, n'incarne pas vraiment l'interventionnisme à tout crin en matière extérieure. Mais ce serait trop demander à Vice que de rentrer dans ces subtilités géopolitiques. Michael Moore, à côté, se hisserait presqu'au niveau d'un Francesco Rosi

Vice, Adam McKay (Sortie en salles mercredi prochain)

 

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